TREILLIERES se situe au nord de Nantes, sur l'axe Nantes-Rennes. Elle fait partie du canton de la Chapelle/Erdre. Elle est délimitée au nord par Grandchamp-des-Fontaines, au sud, par Nantes, à l'est par la Chapelle-sur-Erdre, à l'ouest par Orvault et la Pâquelais-Vigneux de Bretagne.
La Commune de Treillières sur le cadastre de 1839 |
Haches de l'âge de bronze |
Treillières étire ses 2900 hectares sur 12 km de long de part et d’autre du ruisseau de Gesvres qui, longtemps, organisa son terroir. Les premières traces relevées de populations remontent au néolithique (3000 à 2500 av. JC) : haches en pierre et mégalithes. Plus tard (vers – 600), le territoire de la future commune fut traversé de voies de communication dont l’une Nord-Sud a perduré jusqu’à nos jours. Le long de son tracé, à La Gîte, on a retrouvé des haches de l’âge de bronze servant alors de monnaie d’échange.
L’installation des Gaulois (à partir de – 500) a fortement marquée la toponymie locale. Dans les vastes étendues de forêts qui couvrent alors les rives du Gesvres, les familles gauloises élargissent les clairières ouvertes à mi-pente des versants par les populations qui les ont précédées, les reliant entre elles par un réseau assez lâche de chemins tortueux. Ils installent leurs villages en haut de ces terres bien égouttées, propres à la culture, et laissent les plateaux aux sols acides à la lande.
Cette borne milaire, rue de la Levée des Dons, a été "christianisée" par l'adjonction d'une croix en fonte en 1876 |
Au début du 3e siècle, les premiers raids de ceux qu’on appellera plus tard « les barbares » perturbent la vie quotidienne. Certains villageois enfouissent dans le sol pièces de monnaie et autres « trésors » que l’on retrouvera à l’époque contemporaine (la Noë-Violin).
Fontaine Saint Symphorien |
Des fontaines, lieux de culte gaulois, sont christianisées ; c’est le cas de la fontaine de la Baclais que l’on consacre à Saint Symphorien jeune romain martyrisé vers 170 dont le culte est très en vogue dans la région nantaise.
Après être passé sous domination franque (5e siècle) le pays nantais connait les raids des Bretons voisins puis, au 9e siècle, ceux des Normands.
Maison de la cour du Bourg construite en 1595 sur le site de la seigneurie de Treillières (photo de 1986) |
chapelle avant restauration |
statue de Notre Dame des Dons (1472). Seules les parties découvertes de la Vierge allaitant Jésus sont en marbre. La tête de Marie, refaite à plusieurs reprises date de 1967 |
L'ancien manoir du Haut-Lin, transformé en métairie a perdu de sa superbe : étage supérieur abaissé, fenêtres murées, tour décapitée... |
Au 16e siècle le retour d’un calme, perturbé par les retombées locales des guerres de religion, amène la réorganisation de la hiérarchie seigneuriale ; tous les manoirs et seigneuries en dépendant passent aux mains du seul seigneur de Treillières installé au château de Gesvres ; il aménage tous les anciens manoirs en métairies.
De la fin du 16e siècle à la Révolution, la population de Treillières avoisine le millier d’habitants, les périodes de croissance démographique étant réduites à néant par les grandes mortalités dues aux « contagions » développées sur une malnutrition cyclique. La vie locale s’organise autour de deux pôles : l’église paroissiale reconstruite en 1613 où le recteur rassemble la communauté villageoise le dimanche et, à la fin de l’office, son organisme représentatif le « général de la paroisse » ancêtre de notre conseil municipal ; le château de Gesvres siège du pouvoir seigneurial (justice, droits seigneuriaux).
Dominant la campagne, l'église, siège du pouvoir spirituel et à droite la maison de la cour du bourg, demeure du juge seigneurial représentant du pouvoir temporel |
Château de Gesvres avec ses douves et ses canaux sur le cadastre de 1839 |
Le château de Gesvres au début du 20e siècle |
A cette époque le terroir villageois alterne les métairies aux importants bâtiments situés au centre de terres nombreuses, bien groupées et les petites exploitations (borderies) aux terres dispersées dont les bâtiments d’habitation et d’exploitation forment des « barres » alignées de chaque côté de la rue du village.
Une ancienne barre à la Rinçais en 1980 |
Moulin de Launay (bas) sur le Gesvres avant transformation |
Moulin de Launay (haut) sur le côteau avant transformation |
Au 18e siècle, après une longue période de conflits pour le contrôle des landes communes avec le seigneur de Gesvres, les Treillièrains entrent avec entrain dans la Révolution élisant le curé pour leur premier maire. Mais la politique religieuse de la Révolution et quelques autres désillusions poussent les villageois vers la contre-révolution. Insurgés en mars 1793, mais trop proches des garnisons nantaises pour rester longtemps dans cette attitude ils se recroquevillent, attendant que passe l’orage, se méfiant de la République autant que de la chouannerie même si leur cœur penche pour la monarchie.
Le maillage géométrique du bocage sur les anciennes landes de Muzon |
La façade et le clocher de l'église actuelle datent de 1836 |
La croix du cimetière date de 1826 |
Plaque tombale de Pierre Douet, modeste paysan, adjoint et maire de Treillières pendant 48 ans |
On se méfie des notables nantais habitant des châteaux et on tient à distance un clergé confiné à son rôle spirituel. Lors des élections nationales où l’on participe ici plus qu’ailleurs dans le canton, alors que la plupart des communes rurales de la région optent pour les royalistes les plus ardents, les Treillièrains tout en restant dans le camp conservateur votent bonapartistes. En 1881 la commune atteint son apogée démographique : 2020 h.
C’est à ce moment qu’intervient le retournement de la conjoncture agricole. Face à la crise les paysans perdent confiance, laissent leurs enfants partir nombreux vers cette ville dont ils se méfient tant et confient le pouvoir municipal a de riches propriétaires nantais qui construisent ou agrandissent des châteaux où ils ne viennent qu’à la belle saison.
Le château du Haut-Gesvres agrandi par E. Dore-Graslin. Il fut la demeure de deux maires |
Calvaire de la Gréhandière |
Croisements de trains en gare de Treillières |
En 1914 c’est une population diminuée (1766 h.) et vieillie qui voit partir ses enfants à la guerre ; 79 n’en reviendront pas.
Sur les tableaux d'honneur, le visage de quelques "Poilus" de Treillières morts pour la Patrie |
10 août 1944 , les américains libèrent Treillières |
Entre l’arrivée des troupes allemandes (19 juin 1940), dont certains soldats logeront pendant toute la durée de l’Occupation sur la commune, et celle des chars américains libérateurs le 10 aout 1944, les Treillièrains suivront leurs notables engagés derrière le maréchal Pétain ; seuls quelques très rares jeunes oseront la Résistance et vivront pour cela l’épreuve de la déportation dans les camps de concentration.
Jusqu’à la fin des années 1960, malgré une reprise démographique et un renouveau de l’agriculture, la commune diminuée de la pointe Sud de son territoire vendue à Nantes garde un mode de vie encore très marqué par la tradition. Puis la poursuite des études (souvent à la ville), le travail des femmes hors du foyer, l’apparition de nouveaux métiers, le développement des moyens de transport individuels, de la télévision, les déplacements pour le travail ou les loisirs à Nantes, l’évolution de l’Eglise catholique… l’apparition de nouveaux habitants venus de la ville ou d’ailleurs modifient la mentalité locale et bientôt le paysage car Treillières cesse d’être une commune à dominante rurale pour devenir un espace d’habitat résidentiel située dans le peloton de tête des communes les plus riches du département de Loire-Atlantique. En dehors de quelques immeubles et lotissements, le pavillon individuel, entouré d’un vaste espace arboré pour isoler de la rue ou des voisins, domine. En 2002, à l’occasion d’un référendum 70% des électeurs rejettent l’entrée dans la Communauté Urbaine de Nantes. C’est moins la ville où l’on va travailler chaque jour dans sa voiture par des routes encombrées qui suscite le rejet, que sa population la plus défavorisée dont on cherche à se tenir à distance.
Au 21e siècle, avec 8000 h., dont la plupart n’en sont pas originaires, Treillières conserve les mêmes réflexes de défiance vis-à-vis de Nantes et de repli sur un entre-nous confortable que les populations des siècles passés, comme si le conservatisme qui a imprégné la commune pendant des lustres pénétrait par osmose les nouveaux habitants.
Jean Bourgeon
Pour en savoir plus :
J. Bourgeon : La vie est dans le pré, portrait d’une commune rurale avant et pendant la Révolution
Le tome 2 couvrant la période 1800 – 1945 dont l’écriture est terminée devrait paraitre dans quelques mois.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Pour insérer un commentaire :
2- écrire le message à publier dans la case réservée à cet effet
3- indiquer si vous voulez votre nom en cochant la case "nom" ou "anonyme" si vous préférez que votre identité n'apparaisse pas.
4- publier et envoyer