Journal Ouest-France du 30/12/2011
Edition : Nantes Nord-Loire - Rubrique : Treillières
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Pour la dernière étape de notre voyage parmi histoires et anecdotes glanées au sein des archives municipales et paroissiales, Jean Bourgeon nous offre en avant-première une «bonne page» du livre à paraître au printemps prochain en partenariat avec l'association Treillières au fil du temps
Sur la photo Jean Moulet, Raymond Civet, Gilbert Durand entre autres….
«La première kermesse de Treillières eut lieu le 10 août 1924 à l'initiative du curé Bodin», rappelle l'historien.
Le bulletin paroissial du 3 août, dans un long éditorial dialogué intitulé “Entre voisines”, annonce l'événement (imitant avec démagogie le parler de deux braves paysannes treilliéraines !)
«Dis donc, as-tu vu sur le journal qu'on va avoir une kermesse dimanche prochain ? Qu'é qu'c'est ça, une kermesse ?»
«Dame, j'sais point trop moi non plus. Mais d'après ce qu'en dit le journal ce doit être une espèce de foire d'été.»
«On voit ben qu'tout change aujourd'hui. Autrefois on n'entendait point parler de toutes ces fêtes, ces cinémas, ces courses, ces séances, ces kermesses. On vivait bien plus tranquilles.»
«Pour ça c'est sûr ! La jeunesse d'aujourd'hui n'est plus la même qu'autrefois. Elle veut des fêtes et toutes les paroisses ont fini par avoir les leurs. Sans cesse nos enfants nous demandent la permission d'aller à l'une ou l'autre et, quand on hésite à leur accorder, y nous disent comme ça qu'y faut bien qui z'aillent ailleurs, puisque ya ren chez nous. Vaudrait-y pas mieux qu'on ait la nôtre ? On pourrait procurer à nos enfants des distractions tout aussi agréables que celles d'ailleurs, on saurait où y sont et on pourrait encore mieux les accompagner en famille».
Et à celle qui s'inquiète de voir ses enfants traîner à la kermesse, l'autre répond :
«Y s'ront ben à même de rentrer de bonne heure puisque la fête s'ra finie vers 6 h. Ainsi tout le monde pourra y assister, même ceux qui sont de garde pourront revenir à temps pour mener les bêtes aux champs».
Une politique cléricale de contrôle de la société
Ainsi les paroissiens découvrent-ils les motivations d'une fête profane sans danger pour l'âme de leurs enfants et bénéfique pour tous puisque l'argent gagné servira à payer la construction de l'école chrétienne.
Le prix d'entrée est modique (50 c) et l'on paie 25 c ou 50 c pour participer aux différents jeux que le dialogue des deux voisines énumère : jeu de massacre (on sollicite ceux qui ont des pots fêlés), roue de la fortune, pêche à la ligne, lapinodrome, concours de tir, etc.
Les attractions sont gratuites : gymnastes, fanfares, danses russes exécutées par des enfants... Ce sont «les jeunes gens de la Notre-Dame» (le patronage) qui sont chargés de la préparation de la kermesse et celle-ci reste fortement sous l'emprise cléricale.
La fête commence à 13 h 15 avec l'arrivée de la fanfare de La Chapelle-sur-Erdre dans l'église pour un Salut au Saint-Sacrement. À la sortie de la cérémonie les jeunes filles vendent des billets sur la place de l'église mitoyenne du terrain où se déroule la kermesse, là même où on va construire l'école chrétienne des filles et la salle paroissiale. Les billets donnent droit à une tombola dont le premier prix est une place pour le pèlerinage diocésain à Lourdes.
Cette première kermesse, qui avec le cinéma, le théâtre, la bibliothèque paroissiale... entre dans une politique cléricale de contrôle de la société, sera reconduite tous les ans au profit de l'école chrétienne.
Même de l'autre bout de la planète on peut découvrir un patrimoine. Merci pour votre blog
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